Portrait : Patrice Bouveret
- Zoé Aireh
- 12 mars 2018
- 4 min de lecture

UNE VIE MILITANTE
Patrice Bouveret, co-fondateur et l’actuel Directeur de l’Observatoire des Armements
Le militant engagé de la campagne ICAN, voit la récompense de leur prix Nobel 2017 de la Paix comme le résultat d’un combat. Pour lui, seule l’abolition des armes nucléaires permettra de renforcer la sécurité humaine et de sortir du risque que font peser ces armes et les crises de prolifération à répétition.
C’est lors de plusieurs missions militantes que la vie de Patrice Bouveret a basculé vers un combat pour renforcer l’égalité et le respect de la planète sur laquelle on vit. Après avoir intégré un collège technique à défaut de ne pas supporter le système scolaire. « L’obéissance du système très hiérarchique de l’époque, je ne voyais pas beaucoup d’intérêt à une forme d’apprentissage reposant sur l’accumulation de connaissances et non la compréhension ou l’apprentissage de méthodes de travail. » Il a quitté l’école à 17 ans pour enchainer plusieurs petits boulots et gagner sa vie.
Motivé par la découverte, le partage, la participation à des activités extra-scolaire comme le scoutisme a suscité l’apprentissage d’autonomie et de responsabilité, individuelle et collective.
« J’ai procédé à l’inverse de beaucoup de personnes »
« Avoir un métier n’a jamais été ma préoccupation prioritaire. En revanche, mes activités militantes m’ont amenées à me professionnaliser. », le jeune homme commence à trouver sa voie « je n’ai aucun diplôme, ma formation s’est faite par la pratique ainsi que par quelques stages militants de formation… ».
Depuis plus de quarante ans, à la suite de son service militaire, Patrice Bouveret est impliqué dans la lutte pour l’élimination des armes nucléaires. « Le film qui m’a marqué alors que j’étais jeûne, qui m’a fait me poser des questions par rapport au service militaire et qui a ancré en moi un antimilitarisme est « Johnny got is gun » de Dalton Trumbo. ».
En demandant le statut d’objecteur de conscience il a pu être affecté dans le service des eaux et forêts en Alsace. « Comme une large majorité des objecteurs de cette époque, j’ai refusé le service civil de remplacement et participé aux différentes actions antimilitaristes sur Lyon ». De son signe Capricorne, il ne croit pas aux règles de la société, celles qu’il se créé lui-même sont justes et bien pensées. En 1984, avec deux autres collègues il créé le CDRPC (Centre de documentation et de recherche sur la paix et les conflits) devenu aujourd’hui « Observatoire des armements » impliqué depuis plus de 30 ans sur les actions concernant l’élimination des armes nucléaires et le contrôle des transferts d’armes de la France.
Dans le prolongement des autres campagnes auxquelles il avait participé contre les essais nucléaires, il rejoint dès son lancement en 2017 la « Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires ». « A partir de 2013 où avec quelques personnes nous avons souhaité faire évoluer le fonctionnement de cette coordination pour qu’elle soit plus active et développe ses propres initiatives, sa propre dynamique avec la mise en place d’un « Comité de pilotage » dont je suis membre depuis le début. »
C’est avec un extrait d’un éditorial d’Albert Camus qu’il explique pourquoi cette vie de militant est importante pour lui, « Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la raison. » : « Comme viennent de le faire tant les dirigeants russes et américains que français en décidant pour ces derniers de renouveler entièrement les deux composantes de l’arsenal nucléaires.»
Vers un avenir incertain
Dans un climat de crises et de guerres, le Prix Nobel de la Paix gagné par l’ICAN est un espoir de plus, après que d’autres personnages comme le Président Obama, ont eu auparavant le prix Nobel de la paix à propos des armes nucléaires, « Cela n’a pas modifié grand chose ; en tout cas cela n’a pas suffit pour arriver à un monde sans armes nucléaires… ».
Le 14 février, 17 personnes ont trouvés la mort sur un campus en Floride, abattus par un ancien élève. Le port-d’arme n’est pas remit en question par le Président Trump : « C’est une fausse conception de la liberté prônée : car pour assurer sa liberté et sa sécurité, il est indispensable que l’autre en face de nous, quel qu’il soit, se sente lui aussi en sécurité, et pas menacé par nous. C’est en assurant la sécurité de l’autre que l’on assure sa propre sécurité. […] Plus globalement, je ne pense pas que les armes soient en elles-mêmes la cause des conflits, mais leur possession, que ce soit au niveau individuel comme collectif, leur accès facile, vient renforcer leur utilisation avec toutes les conséquences que cela entraîne en terme de conséquences, de morts… ».
Le 3 septembre 2017 un sixième essai nucléaire souterrain a été lancé par la Corée du Nord vers les Etats-Unis, ces échanges brutaux inquiètent le monde entier, et la détention de l’arme nucléaire est remit en question. « Ne plus laisser aux professionnels de la politique et de la guerre la responsabilité d’assurer la paix ! », « Pour sortir de cet engrenage insensé dans lequel aucun chef d’État ne doit entraîner son pays, il n’y a que deux voies complémentaires : l’ouverture de négociations et… l’abolition des armes nucléaires. ».
Alors que le monde n’a plus de limite, que les armes sont faciles d’accès et que le savoir faire est de plus en plus massif et dangereux, on est plus que jamais en danger. Soucieux de préserver les richesses et les connaissances, Patrice Bouveret acquiert et continuera d’acquérir : « La diffusion des idées, la transmission de notre histoire si souvent absente de l’histoire « officielle », des médias, a toujours occupé une place très importante dans mes activités… ». Le mode de pensée du Capricorne est tourné vers l’idée de transmettre ses biens. Il cherche à préserver ses richesses et ses possessions pour les générations futures. « Arrivant à un âge certain, je souhaiterais assurer la transmission pour que les nouvelles générations s’approprient le sujet… », « La diffusion des idées, la transmission de notre histoire si souvent absente de l’histoire « officielle », des médias, a toujours occupé une place très importante dans mes activités.»
Zoé R.
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